Plateformes SVOD : quels contenus pour poursuivre la croissance?

S’il y a 10 ans les plateformes SVOD commençaient à faire leur apparition, aujourd’hui elles occupent une place importante sur le marché de l’attention et gagnent du terrain par rapport à la télévision classique et les autres médias traditionnels. Selon une étude d’Ampere Analysis (1), en 2023 la consommation en ligne a représenté 53% de la consommation vidéo, dépassant ainsi la consommation linéaire ( 47%) sur les 18-64 ans. L’écart est encore plus grand chez les 18-24 en France avec 83 % de la consommation en ligne contre 17% en linéaire et sur l’ensemble de la population dans les autres grands pays européens et aux États-Unis. 

Netflix a annoncé la semaine dernière avoir dépassé son objectif pour le dernier trimestre de 2023 avec 13.1 millions d’abonnés supplémentaires et cumule désormais 260 millions d’abonnés à travers le monde. Ses principaux concurrents sont Prime Vidéo avec plus de 200 millions  d’abonnés, Disney + avec 150 millions d’abonnés et Paramount avec 63 millions d’abonnés. Cette barre symbolique de 250 millions d’abonnés a pu être franchie en partie grâce à sa stratégie contre le partage de mots de passe et à la création d’une nouvelle offre moins chère avec publicité, offre avec publicité qui est maintenant disponible chez ses concurrents Prime Vidéo et Disney+. Mais dans le futur ces mesures vont atteindre leurs limites et pour les plateformes de streaming une diversification des contenus sera nécessaire.

Le marché de la vidéo à la demande est un marché très concurrentiel sur lequel de nouveaux entrants font régulièrement leur apparition. Avec une multiplication des offres d’abonnements disponibles et face à l’abondance des contenus, les utilisateurs sont souvent contraints de faire en choix concernant le service choisi. Ce choix se fait non seulement en prenant en compte leur enveloppe “loisirs” disponible qui se voit diminuer à cause de leur baisse de pouvoir d’achat, mais aussi en fonction des contenus disponibles.

Netflix et Prime Vidéo : au delà de la fiction

La fiction et le sport sont les deux types de contenus qui traditionnellement attirent les abonnés et cela semble être une des stratégies de diversification depuis plusieurs années déjà. En effet, nous avons tous vu Amazon gagner une bataille symbolique face à France TV pour la diffusion du quart de finale qui opposait Rafael Nadal à Novak Djokovic lors du tournoi de Roland Garros en 2022. Et le tennis ce n’est pas le seul terrain sur lequel le géant américain est allé afin d’élargir son parc d’abonnés. Depuis 2021, Amazon diffuse un paquet des matchs de la Ligue 1 et a déjà acquis les droits TV pour la période 2024-2029. Selon le baromètre de NPA conseil, le “Pass Ligue 1” est estimé à 1,7 millions d’abonnés et cela ne serait pas un investissement rentable pour la plateforme. En revanche, en Angleterre, au moment de l’acquisition des droits de la Premier League Prime Vidéo a vu une croissance de 35% de son parc d’abonnés (2).

En ce qui concerne Netflix, depuis son lancement la plateforme avait opté pour une stratégie différente concernant les contenus sportifs. Afin d’éviter de payer les droits de diffusion très élevés, Netflix avait opté pour la production des documentaires comme “Break Point” ou encore “Tour de France : au coeur du peloton” qui ont été dans le top des programmes les plus visionnés. De plus, pour se lancer dans le live streaming, la plateforme s’est concentrée sur l’organisation des  événements comme la Netflix Cup durant laquelle des binômes des golfeurs et des pilotes se sont affrontés dans une course à Las Vegas en novembre dernier. Néanmoins, cette stratégie semble évoluer avec l’annonce la semaine dernière d’un accord de 5 milliards de dollars avec World Wrestling Entertainment pour la diffusion des principaux événements (3).

Sur un marché de l’attention sur lequel chaque acteur souhaite capter le plus les utilisateurs, un autre type de contenu est  plébiscité par les plateformes : les jeux vidéo. En effet, les jeux vidéo ont la capacité d’augmenter le temps d’écoute, car à la différence de la fiction et des contenus sportifs, en dans la consommation des jeux vidéos, les abonnés ne sont plus des simples spectateurs et participent activement à leur expérience. Netflix s’est déjà positionné sur le sur ce type de contenus et a annoncé une croissance dans le taux d’engagement sur son offre des jeux vidéo notamment porté par le lancement de la trilogie Grand Theft Auto (4). La compagnie a déjà annoncé le développement des jeux vidéo à partir de ses franchises comme Squid Games, Mercredi ou encore Black Mirror.

Disney+ et Paramount, quant à eux, ne proposent pas actuellement de jeux vidéo. Étant donné que les deux studios possèdent d’importantes IP au vu de leur passé cinématographique, cette possibilité n’est pas à exclure dans les années à venir.

Quels autres contenus et fonctionnalités ?

Dans la poursuite de la croissance, une convergence médiatique pourrait apparaître sur les plateformes de streaming, car afin de garder leur parc d’abonnés et pour en acquérir de nouveaux, les offres devront se distinguer en termes de valeur perçue par les utilisateurs. Ainsi, il n’est pas impossible de voir de nouvelles fonctionnalités et d’autres types de contenus faire leur entrée chez Netflix, Prime ou Disney.

Selon une étude de Insider Intelligence (5), concernant le temps d’utilisation en moyenne, TikTok a dépassé Youtube (58 minutes par jour contre 48,7 minutes) et se rapproche de Netflix (62 minutes par jour). Or, les deux “poursuivants” de Netflix sont basés sur les contenus produits par les utilisateurs (UGC). Même si pour les plateformes de streaming ouvrir la possibilité aux abonnés de publier des contenus viendrait avec des réels enjeux de régularisation, cette hypothèse pourrait permettre d’accroître le temps d’attention. Le développement d’une telle fonctionnalité aurait d’autres avantages. D’un côté pour les plateformes qui sont déjà présentes sur les réseaux sociaux dans leur objectif de promotion et de communication, elles pourraient utiliser les mêmes contenus au sein de la plateforme et créer un engouement autour des programmes disponibles. D’un autre côté, pour les créateurs de contenus cela pourrait être un moyen de favoriser la création autour du service de streaming sur les médias sociaux et une nouvelle manière de monétiser les vidéos crées. 

Aujourd’hui on peut voir des extraits des films ou séries défiler sur nos réseaux sociaux, mais très souvent même si l’on les enregistre, ils tombent dans l’oubli. La possibilité de les avoir au sein du diffuseur originel de la série peut nous permettre de l’ajouter à une liste des contenus que l’on souhaite regarder.

Un autre élément qui manque sur les plateformes de streaming et qui peut faire augmenter l’engagement, c’est le sentiment de communauté. En effet, n’est malheureusement pas possible de regarder ensemble ou d’échanger avec d’autres personnes passionnées par le même contenu au sein d’une plateforme. Or, en ayant la possibilité de le faire, notre temps d’utilisation pourrait augmenter.

Sebastian Udriste

Sources :

(1)

https://www.cnc.fr/documents/36995/2097582/Observatoire+de+la+vid%C3%A9o+%C3%A0+la+demande_vpublication+2.pdf/ff3f2dc7-fd52-8969-ecd1-fb55ab663a8f?t=1706086607452

(2)

https://www.theguardian.com/media/2020/feb/20/amazon-prime-video-outpaces-netflix-growth-after-premier-league-debut

(3)

https://www.sudouest.fr/sport/5-milliards-de-dollars-netflix-s-adjuge-les-droits-pour-diffuser-le-catch-americain-de-la-wwe-18265528.php

(4)

https://www.ign.com/articles/netflix-games-engagement-tripled-in-the-last-year-in-part-thanks-to-gta

(5)

https://www.latribune.fr/technos-medias/internet/en-temps-passe-tiktok-se-rapproche-de-netflix-aux-etats-unis-953936.html

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