Le renouveau des biopics : quand l’art rencontre le profit

Cela n’a pas pu vous échapper : depuis la réouverture des salles de cinéma françaises en 2021, les biopics se sont imposés comme le genre de prédilection de nombreux cinéastes. Maestro, Niki, La Méthode Williams, Rocketman, Napoléon, Blonde… Les films biographiques envahissent aussi bien les écrans de cinéma que les plateformes de streaming.

Pourtant ce phénomène n’est pas aussi récent qu’il n’y parait. Selon The Movie Database, il trouve racine dès le début des années 2010, porté par le succès commercial et critique de La Môme. Dans ce film, Marion Cotillard incarne Edith Piaf avec brio, une performance qui a valu au long métrage une pluie de récompenses, dont cinq César et deux Oscar. Avec plus de 85 millions de dollars de recettes dans le monde, ce triomphe ne pouvait pas passer inaperçu et a incité les réalisateurs et les producteurs à explorer ce genre jusqu’alors négligé. Résultat : le nombre de biopics réalisés a presque doublé en une décennie, passant de 183 films biographiques sortis dans les salles françaises entre 2000 et 2010 à 340 entre 2010 et 2020.

Un choix plus que payant pour un bon nombre de sociétés de production, puisque le public semble conquis. Depuis 2021, au moins un film biographique figure chaque année dans le top 20 des films ayant cumulé le plus d’entrées en France. L’année 2024 connaît même un double succès grâce aux 2 millions d’entrées de Monsieur Aznavour et de Bob Marley : One Love qui se classent à la 13ème et 14ème place du classement. Côté critique, la reconnaissance est tout aussi éclatante. Avec respectivement sept et quatre Oscar, Oppenheimer et Bohemian Rhapsody n’ont rien à envier au succès de La Môme.

Cependant, produire un biopic est loin d’être une tâche aisée. Entre les négociations souvent complexes avec les ayants droit, soucieux de protéger l’image des personnalités concernées, et les polémiques fréquentes sur la véracité des faits ou les choix artistiques du réalisateur, le succès commercial et critique n’est jamais garanti. Quels sont les facteurs de réussite et les pièges à éviter lors de la réalisation de ces films ? Quels avantages les producteurs et les studios tirent-ils de ces œuvres ? Zoom sur l’univers des biopics, un business devenu particulièrement lucratif.

Faire revivre les icônes et leur époque, la recette gagnante des biopics

Le succès des films biographiques repose sur deux mécanismes bien connus des psychanalystes : notre attrait pour la nostalgie et le culte que nous vouons aux personnalités publiques. En proposant aux spectateurs une œuvre dédiée à leur star préférée et en leur promettant une immersion dans une époque qu’ils ont adorée ou qu’ils auraient rêvé vivre, les biopics réunissent tous les ingrédients nécessaires pour susciter notre curiosité. Les producteurs l’ont bien compris : en racontant la vie d’une figure emblématique, ils bénéficient d’un double avantage. D’une part, ils s’appuient sur un scénario préfabriqué, riche en moments marquants et en drames réels qui captivent d’emblée. D’autre part, ils touchent un public préexistant, composé des fans inconditionnels de la personnalité en question, déjà prêts à se précipiter dans les salles et à commenter en masse leur adoration pour le film sur les réseaux sociaux. Ces deux atouts font des biopics un investissement à la fois stratégique et rentable pour l’industrie cinématographique.

Les biopics musicaux : une mine d’or pour les producteurs, les annonceurs et les maisons de disques

Du fait de leur capacité à immerger les spectateurs dans une époque, les biopics musicaux sont particulièrement prisés par les producteurs. Les chanteurs et musiciens comptent parmi les célébrités les plus adorées par le public, et leurs chansons agissent comme de véritables machines à remonter le temps. Le film Bohemian Rhapsody réalisé par Bryan Singer et Dexter Fletcher est un exemple parfait de la puissance des biopics musicaux. Grâce à ses décors et ses costumes plus vrais que nature mais surtout à sa bande originale électrisante, le film a su faire voyager son public aux côtés de Freddie Mercury dans les rues londoniennes des années 1980. Au-delà de ses multiples récompenses, le long métrage a comptabilisé plus de 51 millions d’entrées rien que sa première semaine d’exploitation aux Etats-Unis.

Les biopics musicaux présentent également un autre avantage, cette fois-ci purement financier. De fait, les producteurs ne sont pas les seuls à vouloir capitaliser sur l’immersion temporelle unique offerte par ces films. Les annonceurs sont, eux-aussi, particulièrement intéressés par le fait d’être associés à l’image positive des célébrités et aux moments marquants de leur parcours. En proposant aux producteurs de financer une partie de leur film en échange d’une visibilité à l’écran de leur produit, les marques espèrent transmettre un message fort aux spectateurs : « Nous étions présents lors de ce moment inoubliable, nous faisons partie intégrante de la pop culture ». Que cela soit Pepsi et Fender dans Bohemian Rhapsody, Chanel et Rolls-Royce dans Rocketman ou les bières Red Stripe dans Bob Marley : One Love, les placements de produits ne se font donc pas rares dans ce genre de films.

Enfin, aux producteurs et annonceurs s’ajoutent les maisons de disques et les artistes. Non seulement ceux-ci réalisent des gains considérables en cédant les droits des musiques utilisées dans le film, mais ils profitent également d’une hausse spectaculaire des écoutes et des ventes de leurs œuvres après leur sortie en salle ou sur plateforme. Selon Deezer, la sortie du biopic consacré à Amy Winehouse en avril dernier a entraîné une hausse spectaculaire des streams de la chanteuse, avec une augmentation de plus de 206 % entre la semaine précédant la sortie du film et celle qui l’a suivie.

Derrière les récompenses et le succès, une réalité plus contrastée

Contrairement à ce que laissent croire ces succès retentissants, tous les films biographiques ne rencontrent pas forcément un engouement à leur sortie. Certains projets, mêmes prometteurs, ne réussissent même pas à voir le jour, en raison des nombreux obstacles inhérents à la réalisation d’un biopic. Bien qu’ils soient porteurs d’un fort potentiel, ces films représentent un pari audacieux, nécessitant des investissements financiers considérables et une prise de risques assumée.

Le choix de la célébrité à incarner constitue une première difficulté. En France, la personnalité doit être suffisamment connue pour séduire un large public tout en parlant français, ce qui limite les options. Le casting est également un casse-tête : l’acteur principal doit non seulement ressembler physiquement à la célébrité, mais doit aussi savoir capturer ses mimiques et sa voix. Ce travail, souvent soutenu par des transformations physiques sophistiquées (maquillage, prothèses et costumes), est inévitablement soumis à la critique : une interprétation magistrale attirera massivement le public en salle, tandis qu’un faux pas risque de condamner immédiatement le film. Les performances remarquables de Tahar Rahim en Charles Aznavour ou de Rami Malek en Freddie Mercury illustrent parfaitement la fascination qu’une telle justesse peut susciter. Enfin, les négociations avec les ayants droit sont souvent source de tensions. Longues et complexes, elles deviennent encore plus ardues si des maisons de disques ou des héritiers interviennent. Pourtant ces accords sont indispensables : sans eux, l’utilisation des musiques ou d’autres paramètres essentiels au récit devient impossible, privant le film de son authenticité. Conscients de l’importance de ces éléments, Bryan Singer et Dexter Fletcher ont dû patienter 8 ans avoir de voir leur film en salle du fait des nombreuses négociations réalisées avec Brian May, Roger Taylor et John Deacon.

Au-delà des enjeux artistiques et financiers, les dérives éthiques des biopics

Même lorsque les producteurs et les réalisateurs surmontent les obstacles artistiques et économiques évoqués, l’adhésion du public n’est pas gagnée. En effet, le biopic est un genre particulièrement codifié, qui suscite des attentes élevées de la part des spectateurs notamment en ce qui concerne la véracité des faits retranscrits. Si cette exigence de véracité est ignorée, le film risque d’être accusé de tirer profit de l’image des célébrités sans réellement leur rendre hommage. Napoléon de Ridley Scott en est un exemple frappant : bien que salué par une partie du public, le film a également été largement critiqué pour ses nombreuses inexactitudes historiques. De même, Blonde a suscité de vives controverses en raison de son parti pris dramatique et de ses scènes violentes, souvent fictionnelles, qui ont profondément choqué les fans de Marilyn Monroe.

Les questions éthiques soulevées ici s’intensifient lorsque les biopics exploitent des histoires tragiques et des figures criminelles. Le cas de la série Dahmer illustre ce phénomène : l’interprétation d’Evan Peters a rendu le tueur presque charismatique, au point que des objets liés à lui, comme ses lunettes, ont été vendus aux enchères pour des sommes exorbitantes (plus de 150 000€).

Ces enjeux ne semblent cependant pas inquiéter les sociétés de production. Trois biopics particulièrement attendus ont déjà été annoncés pour l’année 2025 : Un parfait inconnu (29 janvier), Maria (5 février) et Michael (1er octobre).

Gabrielle SIMON


Références :

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2023 pourrait être une année décisive pour les services de streaming

Il est clair que les plateformes de streaming sont là pour rester, tandis que les groupes média traditionnels sont en pleine transformation. En 2022, Apple a remporté l’Oscar du meilleur film pour CODA, Amazon a racheté MGM, et Netflix a investi dans les jeux et développé des offres contenant de la publicité pour la première fois. En outre, le nouveau PDG de Disney, Bob Chapek, est en train de restructurer l’entreprise pour qu’elle se concentre davantage sur le streaming.

Une étude réalisée par Morgan Stanley (2022) a démontré que si ces efforts ne parviennent pas à produire des bénéfices significatifs en matière de streaming, les options pour ces entreprises seraient de se retirer ou de se consolider. Par conséquent, 2023 sera une année cruciale pour les nombreux acteurs du streaming.

La pression est de plus en plus forte pour équilibrer les réseaux linéaires en déclin et les services de streaming non rentables

Il est probable que la qualité du contenu souffrira en 2023. Jusqu’à maintenant, les services de streaming payaient des frais de production et de licence exorbitants, et ce n’est tout simplement pas une voie durable vers la rentabilité à long terme. C’est pourquoi, dans un futur proche, nous risquons de voir un mélange de contenus contenant probablement plus de contenus bon marché et renouvelables au détriment des séries et films originaux de qualité (Ubertalli, 2023). Ceci est problématique car c’est souvent la qualité du contenu qui incite les utilisateurs à s’abonner. Les services de streaming doivent trouver le bon calcul économique qui leur permettra de maintenir la qualité tout en augmentant leur rentabilité. Selon le groupe de recherche Ampere, la croissance globale des dépenses en contenus originaux devrait passer de 6% en 2022 à seulement 2% en 2023 (Ampere Analysis, 2023). Si l’on exclut les arrêts de production pendant la pandémie de coronavirus, le taux d’expansion est le plus faible depuis plus de dix ans, période pendant laquelle les dépenses mondiales totales sont passées de 128 milliards à 243 milliards de dollars (ibid.).

Cette nouvelle analyse s’aligne sur un rapport précédent d’Ampere, qui montrait une diminution des commandes de séries scénarisées dans l’ensemble du secteur (Ampere Analysis, 2022). Une façon de réduire les coûts de contenu est de produire des séries non scénarisées, qui sont moins coûteuses par heure de divertissement. Le déclin du streaming à gros budget est déjà en cours, puisque des sociétés comme Warner Bros. Discovery ont déjà procédé à des annulations très médiatisées et arrêté des productions. De même, on s’attend à ce que Disney, sous la direction de Bob Iger, apporte des changements importants à sa stratégie de streaming. Quant à Netflix, le service a déclaré qu’il maintiendrait ses dépenses de contenu à environ 17 milliards de dollars pour 2023, comme il l’a fait en 2021 et 2022, mais qu’il dépenserait cet argent de manière plus efficace (Ubertalli, 2023).

Réduire les dépenses de contenu tout en augmentant le prix des services : une combinaison dangereuse

La plupart des nouveaux services de streaming s’efforcent de générer des revenus plus élevés par utilisateur en 2023. Pendant ce temps, Netflix descend en gamme avec son nouveau niveau de service financé par la publicité. Les deux stratégies visent à maximiser la croissance totale des revenus. Disney a déjà mis en œuvre sa hausse de prix, et de nombreux autres diffuseurs en continu prévoient de le faire également, si ce n’est déjà fait. Warner Bros. Discovery prévoit de fusionner HBO Max et Discovery+, ce qui pourrait s’accompagner d’une hausse des prix (Charp, 2022). Faire payer plus tout en offrant moins est une opération difficile pour les diffuseurs. En 2022, les consommateurs se sont déjà montrés sensibles aux prix, passant d’un service de streaming à un autre. Netflix, en particulier, a eu du mal à faire progresser le nombre de ses abonnés après avoir augmenté ses prix au début de l’année (Bayard, 2022).

Alors que les consommateurs sont aux prises avec l’inflation et tentent de réduire les dépenses non essentielles, Apple a servi à ses clients une autre pilule difficile à avaler. La société augmente les prix d’Apple TV+ et d’Apple Music et Apple One, citant une augmentation des coûts de licence et la qualité de ses services comme des raisons justifiant cette décision (Grably, 2022). À compter d’aujourd’hui, chacun des services mentionnés ci-dessus verra son prix mensuel augmenter de 1 à 3 dollars par mois, et les prix des abonnements annuels augmenteront en conséquence.

La décision d’Apple d’augmenter ses prix de streaming intervient quelques mois seulement après que Netflix et Disney, leaders du marché, ont pris des mesures similaires. En janvier, Netflix avait annoncé sa deuxième augmentation de prix en moins de deux ans, portant le prix de son forfait standard à 15,49 dollars par mois. Disney, quant à lui, a fait passer le prix de son abonnement standard Disney+ à 10,99 dollars en décembre dernier. Cette dernière série d’augmentations de prix intervient à un moment désagréable pour les consommateurs, qui doivent désormais faire des choix difficiles en ce qui concerne leur budget divertissement.

Selon les résultats récents de l’enquête mondiale sur la consommation de Statista, deux tiers des adultes américains ont déclaré qu’ils réduiraient leurs abonnements pour économiser de l’argent en période de forte inflation, et les augmentations de prix pourraient contribuer à forcer la main des gens (Statista, 2022). Si l’on exclut Netflix, Morgan Stanley (2022) estime que les services de streaming ont subi des pertes d’exploitation d’environ 10 milliards de dollars en 2022. Les pertes devraient culminer pour certains services en 2023 dans ce que les analystes appellent une « année de basculement », où il sera clair que les coûts atteindront des niveaux insoutenables.

Certains services trouvent déjà d’autres voies pour réaliser des bénéfices

Les plateformes de streaming sont confrontées à un environnement difficile en raison de la concurrence et de la télévision linéaire traditionnelle. Si elles ne parviennent pas à générer suffisamment de bénéfices grâce à leur service de streaming, elles risquent d’avoir du mal à rester à flot. Par conséquent, celles-ci peuvent être amenées à envisager d’autres manières de réaliser des bénéfices.

En 2022, le « free, ad-supported television streaming » (FAST) a continué à s’accélérer. Pluto TV de Paramount, Tubi de Fox, Freevee d’Amazon et Roku Channel ont enregistré des gains qui, dans certains cas, ont dépassé la croissance des services par abonnement (Paoli Lebailly, 2022). Aujourd’hui, d’autres cherchent à se lancer dans cette voie rapide, notamment Warner Bros. Discovery qui a annoncé son intention d’accorder des licences pour certains contenus diffusés sur HBO Max (notamment Westworld) à des partenaires FAST tiers (Hailu, 2022). En outre, David Zaslav, responsable de Warner Bros. Discovery, a déclaré que la société allait « attaquer agressivement » le marché du streaming avec sa propre offre FAST qui sera lancée en 2023 (ibid.).

Néanmoins, des services comme Netflix n’ont pas la possibilité d’accorder des licences sur leur contenu à d’autres plateformes car il est exclusif à leur service. Pour pallier cette situation, Netflix a introduit un niveau de service soutenu par la publicité et prévoit de sévir contre le partage de mots de passe à l’avenir afin de diversifier ses sources de revenus et de conserver ses abonnés existants (Fougères, 2022). Les plateformes venant de lancer des offres avec publicité comme Netflix et Disney+ prévoient que le revenu moyen par compte sera égal ou supérieur à celui de l’abonnement équivalent sans publicité (AFP, 2022). Mais le marché est confronté à un grave ralentissement des dépenses publicitaires, de sorte que cela pourrait ne pas apporter la même augmentation des revenus que celle à laquelle pensaient les équipes de direction lorsqu’elles ont élaboré leurs plans.

Quant à Disney et Warner Bros. Discovery, les deux groupes sont fortement tributaires des bouquets de chaînes câblées, les fameux « bundles » (Bunch, 2022). Sur un marché saturé, Amazon, HBO Max et d’autres fournisseurs de services de streaming explorent également les forfaits à prix réduit et les partenariats avec leurs rivaux. Les principaux acteurs du secteur ont du mal à se développer sur un marché aussi encombré et réalisent qu’ils doivent proposer leurs offres sous de nouvelles formes. Cela signifie moins de « commandes à la carte » et l’apparition d’une nouvelle ère de forfaits.

D’autre part, certains services de streaming espèrent ajouter leurs services aux abonnements des grands retailers. Paramount Global a conclu un accord pour que son service de streaming Paramount+ soit proposé dans le cadre du programme d’adhésion Walmart+ à 98 dollars par an (Cagan, 2022). Pour que les acteurs du streaming puissent conclure des partenariats avec les retailers, ils doivent surmonter un certain nombre de difficultés, notamment savoir qui peut accéder aux données des clients et comment répartir les ventes de publicité. Cela explique en partie pourquoi les négociations dans ce secteur ont progressé lentement. De plus, les partenariats peuvent comporter des risques financiers. Si une offre groupée n’est disponible que pour une durée limitée, de nombreux clients risquent de la quitter à son expiration.

Conclusion

En 2023, ce sera au plus fort de se débrouiller. Les services de streaming qui ont le soutien, l’envergure et la diversité financière nécessaires pour jouer le jeu à long terme et fonctionner avec des marges plus faibles, ou des marges d’équilibre, seront les mieux placés pour survivre. La pression est désormais forte pour que ces services soient rentables. L’abondance des options de streaming proposées aux consommateurs aujourd’hui laisse penser que ce seront les choix du public qui définiront de manière significative l’avenir du secteur du streaming.

Capucine CHAPPEY

Bibliographie

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