La menace de l’économie digitale : comprendre et appréhender la fraude publicitaire
Dans le nouvel univers digital qui se dessine au sein de nos smartphone, ordinateurs et autres tablettes, une place importante est consacrée à la publicité. En effet, face à cet horizon infini d’espace libre et à la quantité vertigineuse d’aficionados du web, les annonceurs ont vite compris qu’ils pourraient tirer leur épingle du jeu. Mais ils ne sont pas les seuls déterminés à profiter de cette ruée vers l’or. Explication.
Le marché numérique de la publicité permet aux annonceurs et aux éditeurs d’échanger des espaces publicitaires et de l’audience Les acheteurs de médias négocient et achètent des espaces dont l’audience est ciblée, afin de véhiculer leur message marketing auprès de potentiels clients.
L’une des multiples technologies sur laquelle s’appuie la publicité en ligne est l’achat programmatique d’espace publicitaire, une vente aux enchères en ligne et en temps réel. Le terme programmatique recouvre un large éventail de mécanismes qui automatisent l’achat, le placement et l’optimisation de la publicité afin d’augmenter la rentabilité des campagnes publicitaires. L’achat programmatique d’espace est censé garantir à l’acheteur que les impressions de ses campagnes publicitaires seront vues par le bon utilisateur, qui pourra alors potentiellement acheter le produit par la suite.
Pourtant, sur ce marché intrinsèquement global, la fraude publicitaire inquiète de plus en plus les annonceurs, et éditeurs. Qui est-elle, et comment s’infiltre-t-elle dans le système ?
Depuis cette année, la fraude publicitaire est la deuxième activité illégale la plus lucrative au monde après la vente de stupéfiants. Une activité publicitaire frauduleuse consiste à tromper les annonceurs en leur vendant différents types de « faux lots » d’espaces, qui s’avéreront etre complètement inutiles au bon développement de leur campagne marketing. Les annonceurs sont tenus de payer pour une exposition qui n’a jamais eu lieu ou, si elle l’a fait, elle n’a pas réussi à atteindre le public visé : dans les faits, les annonceurs perdent de l’argent en payant pour des publicités fantômes. De nombreux et différents types de fraude sont recensés à ce jour, trois sont identifiées comme étant les plus répandues.
La fraude d’impression est la pratique frauduleuse par laquelle une campagne publicitaire est artificiellement générée, sans avoir la moindre chance d’etre vue par un humain, et pourtant comptabilisée et indument facturée à l’annonceur.
La fraude par clic survient lorsqu’une personne non-humaine, un script automatisé ou un programme informatique, imite le comportement d’un utilisateur, en cliquant sur des annonces de manière systématique, sans avoir de réel interets donc pour la marque payant la campagne.
La fraude de conversion n’est qu’une variante de la fraude par clic, plus difficile à déceler cependant car le volume de clic ne dépasse jamais la normale. Ainsi, les fraudeurs attirent moins l’attention sur le trafic qu’ils génèrent, ils gagnent donc du temps sur leurs victimes.
A l’origine de ces arnaques, plusieurs facteurs continuent de contribuer à la persistance de ce problème: d’abord, la nature ouverte du marché publicitaire programmatique permet à n’import quel annonceur ou éditeur d’acheter ou de vendre. La barrière à l’entrée de ce marché est faible, ce qui rend le concept certes démocratique mais donc facilement pollué, utilisé à mauvais escient par les fraudeurs. De plus, les montant des investissements ne cessant d’augmenter, la complexité des moyens de paiement rend difficile le suivi des sommes investies. En outre, les chaînes d’intermédiation s’étendent un peu plus tous les jours car les fournisseurs de services techniques se multiplient. Ainsi, la distance entre les éditeurs et les fournisseurs de contenu ne cesse de croître. Alors, à cause de la taille du marché, de la complexité des structures, des obsessions de résultat de la part des annonceurs et de l’absence de frontières: la fraude publicitaire est devenue une fraude globale à grande échelle.
De toute évidence, la fraude publicitaire menace le monde de la publicité numérique dans son ensemble. Elle se produit à l’échelle mondiale, mêlant différents types d’espace publicitaires à différentes audiences, différents fraudeurs à différents types de régulateurs opérant dans différents pays. Elle existe sur un large éventail de sites web, de Facebook à Pornhub. C’est un vrai défi d’estimer le montant des pertes et de retracer la route de ces millions de dollars perdus. Cependant, il est essentiel que nous soyons conscients de cette fraude digitale. Plus nous le serons, plus les vraies annonces seront lucratives pour leur annonceurs légitimes, et moins fort sera l’impact de la fraude publicitaire sur l’économie.
Cette réflexion nous invite à nous demander comment lutter efficacement contre la fraude publicitaire. Les « ad blocking » nous seront-ils profitables ?
Noémie Bécache.
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