L’audience TV face à la multiplication des écrans

Dans le cadre de la présentation de son traditionnel bilan de l’année TV pour 2018 le 23 janvier dernier,   Médiamétrie a annoncé le renforcement de  Mediamat d’ici 2020.  L’évolution de sa mesure des audiences télévisées va intégrer  les programmes visionnés sur les «  écrans internet » à savoir smartphones, ordinateurs et tablettes, et en la complétant avec ceux regardés en dehors du domicile.

Médiamétrie mesure l’audience TV depuis 1985

Succédant en 1989 à l’Audimat ( créé en 1985)  , Mediamat de Médiamétrie est une mesure de référence en matière d’audiences télé en France. Médiamétrie a équipé  5000 foyers , soit près de 11500 individus âgés de plus de 4 ans  représentatifs de la population,  d’ un boîtier installé sur le poste de télévision et d’une télécommande  spécifique permettant à chaque membre du foyer ainsi que leurs invités de s’identifier individuellement lorsqu’ils regardent un programme devant la télé.  Ces informations sont transmises quotidiennement aux serveurs de Médiamétrie entre 3h et 5h du matin et  sont par la suite traitées,  contrôlées  et extrapolées pour obtenir une audience nationale . Leur restitution se fait à partir  de 9h aux clients souscripteurs de la mesure Médiamétrie (  directions de programmes ,  régies pub, agences média , annonceurs …).

Les résultats sont précis et détailles : pour chaque programme, chaque tranche horaire ,  on peut savoir à quelle catégorie il a le plus plu ( homme , femme , âge , CSP) et savoir si un programme a plu à la cible souhaitée.  Le calcul se base sur le temps d’écoute. Pour Médiamétrie, un téléspectateur est une personne qui regarde l’intégralité d’un programme.

Ces résultats permettent d’analyser les habitudes de consommation télé et leurs évolutions.

L’année TV 2018 en  quelques chiffres clés Mediamat

  • 44,1 millions de Français regardent la télévision quels que soient l’écran et le lieu, dont 4,5 millions qui le font via les « écrans internet » smartphone , ordinateurs, tablettes( +29% en deux ans)
  • Taux d’équipement : 93% pour la TV ; 76% pour l’ordinateur (+11,2pts en 3 ans)  et la console connectée atteint presque 20% d’équipement
  • 40% des foyers sont équipés des 4 écrans .
  • 85% des Français regardent la TV sur un téléviseur au moins 1 soir par semaine
  • Les Français ont passé 3h46 par jour devant les programmes TV en 2018 tous écrans confondus dont  3h36 devant le téléviseur
  • 90% de leur  durée d’écoute TV est faite de façon linéaire classique.
  • Pour les 15-24 ans, cette durée passe à 79% d’écoute TV linéaire classique. Les 21% sont constitués de replay, de TV hors écran de TV ou de TV hors domicile.
  • Chez les 15-24 ans, la TV en live sur téléviseur est passée à 43% de l’usage TV, contre 53% en 2017. 28% de la fréquentation est consacrée aux vidéos en ligne contre 24% l’an dernier.
  • Plus de 4 millions et demi de Français regardent désormais chaque jour un programme en vidéo par abonnement
  • Le replay a progressé de +26% en 2 ans et touche 7,2M de Français ( +d’1 heure par jour). La fiction constitue 50% de la consommation en replay
  • La SVOD progresse , 30% des internautes ont utilisé un service de SVOD en 2018 ( croissance de 10% en 1 an .

Au regard de la baisse de la consommation en live sur le téléviseur  (- 3% chaque année), de la hausse des nouveaux usages en replay sur ( +20%) ,et hausse ( +20%)  de la consommation  télé sur les « écrans internet » , l’évolution de la durée d’écoute révèle une transformation du mode de consommation de la télévision.

La TV reste un média puissant

La télévision  linéaire reste cependant un média stratégique pour les annonceurs car :

  • Elle est un média de masse permettant une force de frappe auprès d’une large audience variée.
  • Son environnement de diffusion brand safety grâce au contexte de programme connu d’avance rassure.
  • Sa capacité à développer rapidement la notoriété et l’image des marques est indéniable : la Télévision est toujours perçue par les annonceurs comme un outil indispensable pour bâtir et construire la notoriété des marques à long terme

Les nouveaux usages «  écrans internet » pèsent 10% de la consommation TV et 20% chez les 15-24 ans . Cette nouvelle audience sur nouveaux écrans  reste certes minoritaire face à la suprématie du poste de télévision mais  elle n’est pas pour autant négligeable. D’où l’idée de Médiamétrie, qui fournit déjà aux chaînes des données concernant les écrans internet, de les intégrer d’ici à 2020 au Médiamat .

Le transfert de valeur et les nouveaux modes de consommation expliquent l’évolution de la mesure  Mediamat.

L’étude réalisée par le cabinet Bearing Point , Medias et publicités en ligne 2017,  rendue publique par le  CSA démontrait déjà le changement stratégique des annonceurs dans leurs dépenses publicitaires au détriment des activités traditionnelles des médias dits « historiques » . Cette étude révélait que :

  • Depuis 2016, la télévision n’est plus le premier support des recettes publicitaires : le support Internet est passé en première position. La part de la télévision dans le mix média est passée de 32% en 2000 à 29% en 2017.
  • Les recettes publicitaires des supports de la Télévision, de la Presse imprimée, de la Radio, de l’Affichage extérieur et du Cinéma ont diminué d’un tiers entre 2000 et 2017. Sur la même période, la publicité sur Internet s’est développée en attirant plus d’un tiers du total des recettes publicitaires plurimédias
  • Les pertes de la Télévision linéaire ne sont pas compensées par les revenus générés sur Internet, les chaînes historiques n’ayant pas réussi à encore réussi à monétiser correctement leur audience sur le digital. Entre 2000 et 2017, les recettes publicitaires de la Télévision ont baissé de 17% en passant de 3,9 à 3,2 milliards d’euros.
  • Les annonceurs ont fait des transferts massifs d’investissement entre supports. En 2017, les investissements Internet représentent 35% des dépenses médias. Les recettes publicitaires dans les supports historiques, notamment la Presse et la Télévision ont baissé respectivement de 71% et 17%.

Les récentes évolutions de la mesure d’audience :

Depuis 2011 Médiamat intègre l’audience en différé des programmes sur l’écran de télévision, puis en 2014 la mesure s’est étendue à la catch up TV (ou replay). Depuis 2016 Médiamétrie , propose en complément de la mesure télé Mediamat , la mesure de l’audience des programmes TV sur les 3 écrans :  ordinateur, smartphone et tablette ( Internet Global 3 écrans) . Chaque jour, les clients souscripteurs de la mesure , peuvent ainsi connaître, pour chaque programme des chaînes qui ont marqué leurs contenus avec le tag eStat Streaming, le nombre moyen de téléspectateurs avec le détail par écran et par mode de consommation (live, différé ou replay).

Mediamétrie souhaite également mesurer l’audience télé en dehors du domicile, par exemple un match qu’on regarde dans un bar, ou un programme qu’on suit sur un lieu de vacances. Une expérimentation est en cours dans  3 000 foyers équipés d’un petit audimètre portable, capable de reconnaitre via des technologies de reconnaissance audio les programmes télé écoutés, où que soit la personne qui le porte.

La multiplication des écrans diffusant des contenus TV et la fragmentation progressive de l’audience rendent plus complexe la mesure de l’audience nécessaire aux annonceurs , régies et responsables de la programmation . Il est donc bien plus complexe de toucher cette même audience à l’aide des méthodes qui ont toujours été appliquées pour la télévision traditionnelle.

La quête d’une mesure plus efficace et acceptée par tous  

L’évolution des usages et de la distribution du contenu a fait perdre aux acteurs historiques la maîtrise de la mesure de leur audience. La reconquête de la valeur, devenue un des principaux objectifs des groupes audiovisuels et de leurs régies commerciales pourrait s’opérer à travers une mesure des audiences plus efficaces et reconnue par tous les acteurs .

Cette  mesure de l’efficacité publicitaire n’est  pour l’heure pas uniforme sur le marché de la publicité Internet malgré plusieurs initiatives .Médiamétrie et les acteurs du marché tentent de construire une norme commune qui permettra de faire le lien entre télévision et digital avec notamment  le GRP vidéo ,une  évolution du standard GRP déjà pratiqué en France mais limité à la diffusion télévisée.  Le GRP Vidéo, établi par Mediametrie  en partenariat avec Integral Ad Science depuis 2015,  est une mesure de l’audience vidéo partagée entre la Télévision et Internet qui prend en compte l’intensité du contact (  durée et la visibilité du visionnage) . La mesure n’a pas été adoptée par les agences ni par les annonceurs à cause de son coût et de  l’absence de coopération de Google et de Facebook qui rendaient la mesure partielle.

Les initiatives d’optimisation de la mesure de l’efficacité publicitaire seront efficaces dès lorsqu’elle seront  adoptées et acceptées par tous les acteurs .

Pour aller plus loin :

www.mediametrie.fr

Etude Médias et Publicités en ligne : Transfert de valeur et nouvelles pratiques publiée en juillet 2018 ( CSA – Bearing Point)

Rédigé par Agathe Melingui

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